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Notes sur le Colloque Varela (23-24/06/03)

1. Autopoièse et Auto-organisation

  • J-P Dupuy : "Not one, not two" : vers une nouvelle dialectique
    • Thèse : FV a toujours officiellement pris des distances avec ceux qui se réclament de l'approche enactives en sciences sociales; néanmoins, au moins dans la première partie de sa carrière, il a manifesté un intérêt et un investissement réels dans l'extension de ses idées au domaine social.
    • Lien forts, dans les années 70, avec la "deuxième cybernétique", i.e. Van Foerster, Illich. Un article paru dans ces années illustre l'approche de FV "not one, not two" :
      • notion de "trinité" (qu'on peut semble-t-il rapprocher de la notion de dialectique). La "troisième partie" est l'unité/le domaine d'existence constituée par l'interaction entre deux niveaux de description qui donnent consistance à une forme, à savoir la forme elle-même, et le processus de production de la forme ("the It/the process leading to It").
      • Analogie (pas très convaincante) entre un graphe récurrent et un arbre "infini" qui s'auto-réplique au sein même de sa structure.
      • Cette approche offre semble-t-il un cadre à la description de phénomènes tels que :
        • l'origine de la monnaie en économie
        • l'origine de la vie en biologie
        • l'origine du sens/de la conscience pour les sciences de la cognition
où ces notions (monnaie, vie, sens) sont à rattacher à cette "troisième partie" qui est à la fois abstraite et opérante.
    • ref : Dupuy,J.P. and F.Varela (1991) Creative circularities: Understanding origins. in: F.Varela and J.P.Dupuy (Eds.) Understanding Origin, Stanford University Intl.Symposium, Boston Studies Phil.Sci., Kluwer, Boston, pp. 1-27
    • un article du web sur la notion de trinité

2. Dynamique et synchronisation


  • J. Petitot : Neurodynamique et Cognition
    • Notion de "dynamique qualitative" comme un outil déterminant  pour la neurophysiologie.
    • Ref à Chr Zeeman (1965) :
      • états mentaux = attracteurs des dynamiques neuronales
      • contenus = structure topologique des attracteurs
      • flux de conscience = évolution lente des attracteurs
    • Théorème de plongement /dimension de plongement = projection d'un espace de mesure de dimension n (le nombre de DDL du système considéré) vers un espace de dimension m correspondant à la dimension d'évolution objective de l'attracteur du système, avec, semble-t-il, n>2m+1.
    • Réseaux d'oscillateurs : M. Le Van Quyen, H. G. Schuster, F. J. Varela (1996): Fast Dynamic Coupling among Slow Neuronal Oscillators, Int. J. of Bifurcation and Chaos, 6 (10), 1807-1816.
    • Principe général pour la modélisation : beaucoup de dynamiques en interaction, localement modulaires, et globalement interactives.
    • Problème : rendre une formalisation suffisamment riche pour être générative.
  • J.-P. Lachaux : Neurophénoménologie et bio-feedback.
    • Pb : comment coupler des comptes-rendus à la première et à la troisième personne?
      • compte-rendu à la 3ème personne : porte sur un espace neuronal (et d'activités neuronales) dont on  peut mesurer la répartition/l'intensité/les synchronisations.
      • comptes-rendus à la 1ère personne : porte sur l'espace cognitif du sujet = compte rendu a posteriori du vécu de l'expérience (soit à très court terme, c'est à dire pendant le déroulement de l'expérience, soit à moyen terme, c'est à dire après la fin de l'expérience).
    • Beaucoup des variabilités observées durant les mesure sont liées à des fluctuations de l'attention qui influencent de façon massive l'activité cérébrale.
    • Le sujet est vu comme un instrument de mesure d'un phénomène qui est caché à l'expérimentateur. Question : quelles sont ses limites en tant qu'instrument de mesure? Le sujet doit acquérir une certaine familiarité avec son expérience interne : capacité à maîtriser son niveau d'attention, à identifier des "clusters phénoménologiques". Le sujet peut dire pendant le déroulement de l'expérience "j'étais concentré/j'étais distrait".
    • Une extension de cette approche consiste à utiliser la propention du sujet à agir sur le contenu de ses pensées : induire des transitions dont le caractère est endogène/produit par le sujet.
  • L. Pézart : Dynamique et psychopathologie
    • Notion de "maladie dynamique"
    • Sujets dépressifs --> une dynamique plus simple, plus prédictive.
  • M. Le Van Quyen : Là où le noeud se noue
    • Notion de connectivité fonctionnelle
    • Notion de noyau dynamique : constitution d'un sous-ensemble spécifique et distribué (durée : 300-500 ms).
      • dynamiquement instable.
      • pôle de référence pour toutes les activités locales.
    • Question : comment les liens fonctionnels se nouent? --> description mathématique sous la forme d'un réseau d'oscillateurs couplés :
      • M. Le Van Quyen, H. G. Schuster, F. J. Varela (1996) -- voir ci-dessus --
      • Kuramoto, Y. Chemical Oscillations, Waves and turbulence, Springer Verlag, New-York, 1984.
    • Problème : comprendre le flot d'information entre les différents niveaux d'intégration : trois échelles temporelles :
      • 1/10 : dynamique d'oscillateurs
      • 1 : synchronisation d'un cluster
      • 10 : échelle "narrative"
  • J. Martinerie : Systèmes dynamiques et anticipation des crises d'épilepsie
    • Caractérisation des pré-crises d'épilepsie
    • signes environs 20 min avant la crise
  • D. Rudrauf : Equilibres/déséquilibres neurodynamiques : la subjectivité dans l'organisation de la résistance.
    • Clôture opérationnelle --> notion de couplage motivé
    • Question de la capacité d'éprouver : éprouver, c'est affronter des transformations dynamiques de notre corps et de notre cerveau (à travers une structure de référence qui nous transforme et nous informe).
      • réaction par rapport à une informations qui n'a pas été prise en compte.
      • résistance à la variance.
      • identité qui s'affirme.
    • Construction d'un niveau d'invariance aboutissant à un noyau dynamique qui résisteaux perturbations.
      • Contre quoi le système résiste? Structure qui s'auto-perturbe.
    • Utilisation de diagrammes temps-fréquence pour mesurer des épisodes de convergence vers un noyau dynamique (correspondant à des accrochages sur une même fréquence).
    • Ref : Rudrauf D., Lutz A., Cosmelli D., Lachaux J.P. and Le Van Quyen M. (2003) From autopoiesis to neurophenomenology : Francisco Varela's exploration of the biophysics of being. Biol. Res., 36, 27-65.
  • E. Rodriguez : Synchronic interactions at several cortical scales
    • Electrodes fractales
    • plusieurs niveaux de description : à chaque niveau (neurone, colonne, groupe), le même principe d'organisation prend place.
    • Une stimulation locale augmente les oscillations locales mais interrompt les oscillations régionales
      • Lors d'une stimulation, il y a une forte baisse de l'activité globale.
      • La région stimulée s'"autonomise", se "coupe" du reste du réseau
      • Les spikes sont produits dans le creux des oscillations
    • Conclusion :
      • grandréseau oscillatoire, faiblement synchrone pendant le repos.
      • réseau oscillatoire local, fortement synchrone pendant la stimulation.

3. Vision

  • S. Neuenschwander : Viewing pieces, seeing pictures
    • Travail sur le pigeon (1993)
    • Question du binding problem
    • Stimuli bi-stables
  • D. Cosmelli : Recurrence and spontaneity : brain dynamics during multistable visual
    • Recherche d'expériences spontanées (qui ne soient pas pilotées par les stimuli)
    • Notion d'assemblée neuronale : activité hiérarchiquement organisée et fondamentalement spontanée.
    • Illusion perceptive:
      • manière de mettre en évidence la dynamique endogène du système.
      • oscillation entre deux perceptions.
    • Travail sur la rivalité binoculaire :
      • notion de suppression et de dominance.
      • possibilité d'une exploration spontanée des percepts alternatifs.
    • Neurophénoméno:
      • invariants intra-sujets
      • invariants inter-sujets
    • On n'impose pas l'instant où l'inversion de dominance a lieu.
    • Les régions impliquées dans l'expérience se réactivent de façon récurrente (ou intermittente).
    • Dialogue occipital/frontal.
    • En définitive, cette étude explore les bases neurologiques de la constitution d'un moment conscient.

4. Enaction

  • P. Bourgine : Vie artificielle et systèmes autonomes
    • Distinction entre systèmes autopoiétiques et systèmes autonomes
      • systèmeautopoiétique(propriété plus forte, plus contraignante) : réseau de processus produisant un réseau de composants reproduisant le réseau de processus. Analogie possible avec la théorie Marxiste : les producteurs sont reproduits par leur production et les produits de l'économie servent à reproduire la force de travail.
      • système autonome : système opérationnellement clos.
        • le cerveau est un exemple de système autonome non autopoiétique.
        • dx/dt=f(x,t) avec f--> f+df et t-->t+dt (système "apprenant")
    • Théorie de la perturbation des systèmes dynamiques : Freidlin, M., and Wentzel. Random Perturbations of Dynamical Systems.New York: Springer, 1984.
    • Autonomie :
      • faire émerger un monde de significations propres.
      • comment "vivre" avec des systèmes autonomes?
    • Notion de dissonance cognitive :
      • analogie entre la membrane d'une cellule et le contrôle des conditions au bord.
      • Le cerveau anticipe le flot sensoriel et réduit le conflit entre les anticipations et le signal effectif.
  • J. Stewart : Soi et non-sens : un nouveau regard sur le système immunitaire
    • Vie=cognition=autopoièse : l'organisation circulaire du vivant et l'organisation circulaire de la cognition ne font qu'une.
    • L'immunologie fait appel à des notions telles que : reconnaissance de formes, apprentissage, mémoire, distinction soi/non soi.
    • Ce que le système immunitaire perçoit est le "soi", ce qu'il ne perçoit pas est le "non-sens".
    • Notion de réseau idiotypique
      • syst. immunitaire central qui intègre les antigènes du soi.
      • syst. immunitaire périphérique.
    • Modelisations sous forme de simulations : formation d'une frontière (adaptative) dans l'espace des antigènes...
  • H. Bersini : Le cercle des autopoiètes disparus
    • Notion de connectivité non homogène au sein d'un réseau avec des noeuds "centraux" fortement connectés et des noeuds "périphériques" à faible connectivité.
  • J.-M. Roy :  Comment peut-on ne pas être représentationnaliste? Cognition, énaction et représentation.
    • L'approche énactive refuse le représentationnalisme, ce qui peut être sujet à débat : peut-on être représentationnaliste sans trahir l'approche énactive?
    • Un concept central est celui de spécification de l'environnement : le monde qui émerge est façonné/défini par les couplages corps/environnement ainsi que par la dynamique d'auto-production (on peut sans doute parler de co-production de soi et du monde issue des couplages et des processus de production à différentes échelles).
      • L'activité cognitive est une "building force" qui  crée le sens/fait surgir un monde
      • Ex : la couleur est une propriété nouvelle qui vient enrichir la réalité et produit de l'activité cognitive.
      • L'activité cognitive est une propriété émergente du mécanisme corporel (produit émergent de l'impact de l'environnement sur le corps).
    • Concept sémantique de représentation : une représentation vise ou fait référence à un objet de l'environnement (intentionnalité de la représentation).
    • L'approche énactive prend(rait) comme  référence première le monde physique --> part du présupposé du réalisme physique (j'ai quelques doutes sur ce point... Varela utilise cependant souvent des modèles physiques déterministes ou stochastiques pour illustrer le concept d'énaction, donc?...).
    • Selon J-M Roy, et si on prend l'hypothèse du réalisme physique (si j'ai bien compris...), le concept de représentation n'est pas en contradiction avec l'approche énactive, simplement:
      • Dans le cas de l'énaction, les représentations cognitives se réfèrent à des objets qu'elles créent.
      • S'il est acquis qu'il n'y a pas d'isomorphisme entre la représentation et le monde en soi, comme dans le cas de la couleur, on ne peut nier l'impact du monde sur le corps (telle qu'une onde électromagnétique venant frapper la rétine) .
      • l'activité (production interne, production externe) issue de l'interaction peut donc être qualifiée de représentation, dans la mesure où elle fait référence, ou du moins trouve sa source, à/dans une structure de couplage corps-environnement (il me parait plus raisonnable de parler de représentation comme référence à la structure de couplage plutôt qu'à l'environnement seul...).
    • Notes personnelles : 
      • il me semble que cette acception de la notion de représentation (comme activité qui fait référence à une structure de couplage qui la crée) est un peu hasardeuse... ou en tout cas fort éloignée des acceptions classiques. Si, donc on joue avec les mots en appelant cela représentation, alors OK, mais à quoi bon?
      • Concernant l'a-priori de l'existence d'un monde en soi (réalisme physique), il me semble que FV a insisté sur la fait que l'activité scientifique est une activité de comptes-rendus --> le "monde en soi" des physiciens est le résultat d'un consensus, mais ne constitue pas une réalité ultime... Prendre pour point de départ ce monde physique est donc un cadre de travail, mais ne constitue pas une option philosophique.

5. Neurophénoménologie

  • B. Pachoud : Quelques aspects des contraintes mutuelles neurophénoménologiques
    • Notion de contraintes mutuelles entre les données phénoménologiques et les données neurologiques.
    • Caractérisation de la prise de conscience :
      • réduction phénoménologique husserlienne
      • pratique de l'explicitation : description de l'expérience subjective fondée sur le réfléchissement de cette expérience.
      • la médiation (présence attentive)
    • Epoché :
      1. Suspension (désengagement attentionnel)
      2. Redirection de l'attention (vers le vécu - les actes opérés dans le vécu -)
      3. Disposition de simple accueil (changement de la qualité attentionnelle)
                         --> Conversion du regard / acte de prise de conscience
    • Nécessité pour la phénoménologie de disposer d'une connaissance des processus attentionnels.
    • L'investigation peut être guidée par la connaissance des caractères structuraux de l'expérience.

    6. Philosophie et éthique

  • Amy Cohen-Varela : L'horizon éthique
    • Notion de contrainte mutuelle :
      • Langage=médiation limitante
      • Caractère métaphorique des outils scientifiques ou de modélisation. Ex : les systèmes dynamiques sont dans un rapport de coopération et de contrainte mutuelle avec l'objet étudié.
      • Le corps vécu différent du corps scientifique/technologique
    • Métaphore su sujet sans fondement (voir notion de vacuité plus bas...)
    • Horizon éthique : la vision nihiliste de l'individu dans la société contemporaine doit être opposée à une forme d'extension du moi (qui ne doit pas être un moi "dilué").

  • Michel Bitbol : La neurophénoménologie et "Mind and Life"
    • Neurophénoménologie <--> groupe "Mind and Life" (dialogue Dalaï Lama/scientifs)
      • Examen des phénomènes du point de vue de la présence attentive.
      • Analogie : 2 angles oculaires offrent une représentation en relief.
      • Elargissement de la notion de nature.
    • Problème : naturaliser sans réduire :
      • Mise entre parenthèse des concepts au profit des méthodes.
      • C'est en réintroduisant la vie humaine que l'on pourra réaborder le "problème difficile"
        • réenraciner la théorie dans le monde de la vie.
        • rendre génératives les contraintes entre neuro et phénoméno. (note sur le mot "génératif" : on a semble-t-il au moins deux niveaux où la notion de générativité est utilisée : les objets que l'on décrits sont génératifs au sens où ils participent à la construction du moi/monde, et la théorie qui décrit les objets cognitifs doit elle même être générative, c'est à dire participer à sa propre extension)
    • Importance d'un retour à la première personne (et la prise de conscience de la première personne) dans la pratique scientifique.
    • Ref au colloque de Cerisy sur l'auto-organisation (1981)
    • Pour Cerisy, voir aussi...

  • Claire Petitmengin : Rencontrer l'expérience subjective
    • Processus cognitif = succession de gestes intérieurs/clusters  phénoménologiques
    • Après 15 ans d'études, il est très déroutant de se rendre compte de cette ignorance de soi-même. Possibilité d'une prise de conscience de la structure de base de notre expérience par la méditation.
      • Nécessité d'imaginer une pédagogie différente.
      • Urgence sociale dans la domaine médical et de l'éducation.
      • Pratique de l'entretien d'explicitation (en lien avec la PNL) - Notion de deuxième personne -
    • Notion de lâcher-prise : nous fournissons des efforts incessants pour maintenir le monde : on rebouche sans arrêts dans la construction incessante du moi et du monde. A opposer au fait d'abandonner, de poser les armes.:
      • Réaliser l'absence de fondement des phénomènes  : notion de vacuité..
      • La perte des fondements est indissociable de la compassion (renoncer à soi-même = devenir joyeux, aimant).
    • Prise en compte de l'expérience humaine et de son potentiel de transformation dans la pratique thérapeutique.  But : transformer la vision du monde et la vie dans le monde.
    • Deux pistes thérateutiques fondées sur l'introspection :
      • Description de la période pré-critique chez les épileptiques --> tourner l'attention vers les processus internes. Possibilité de maitriser la survenue d'une crise par la pratique de l'attention.
      • Pratique de la méditation contre la dépression.

  • Nathalie Depraz : Mettre la méthode phénoménologique au travail dans des protocoles d'expérience : passages génératifs entre l'empirique et le transcendental.
    • voir aussi
    • texte sur la pratique phénoménologique
    • Elements de vocabulaire phénoménologique :
      • "passage génératif"
      • "contraintes génératives mutuelles"
      • "requalification" = "co-transformation"
      • réduction refaçonnée par une mise à l'épreuve.
      • mise entre parenthèses = Ne plus être intéressé par = époché = suspension
    • Husserl :
      • mouvement de conversion réflexive
      • Viser l'acte de conscience qui vise l'objet.
    • Disposition mentale : accueillir la générativité de l'expérience
      • C'est le contraire d'une méthode formelle
      • 1ère, 2ème, 3ème personnes : dynamique/tissu relationnel.
      • Invitation à s'exercer proposée par l'expérimentateur. L'expérimentateur a son rôle à jouer : il propose un espace de suspension/d'époché.

  • Jean-Michel Besnier :Pour une éthique sans délibération
    • Question de la pratique de l'éthique.
    • Affronter l'absence de fondements sans en faire quelque chose de négatif.
    • Ethique = une des modalités du couplage structurel.
    • Le savoir-faire d'un expert écheppe à la méthode/la déduction :
      • Pas de délibération
      • Difficle à expliciter/élucider
      • On peut être excellent sans avoir la théorie de ce savoir (Platon --> Ménon).

Annexe



 

 



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