La déstabilisation du système (2.2) intervient lorsque l'application linéarisée du système au point fixe devient dilatante dans une direction (voir page
).
L'étude spectrale de la jacobienne permet de déterminer l'instant où une direction passe de la contraction à la dilatation.
À
croissant, cette déstabilisation intervient lorsque le rayon spectral
de la jacobienne (la norme de la plus grande valeur propre) atteint la valeur 1.
Dans un système dont le point fixe est
, l'expression de la Jacobienne est
En utilisant le théorème de Girko [83] sur les grandes matrices aléatoires, on prédit que la répartition limite des valeurs propres de la matrice des poids est une répartition uniforme sur le disque complexe de rayon
, et par conséquent sa plus grande valeur propre est
.
Ainsi, pour une matrice de taille
(grand) dont les valeurs sont tirées selon une loi gaussienne centrée d'écart-type
, la valeur du rayon spectral est approchée par
.
Des mesures numériques sur des matrices aléatoires de taille finie montrent néanmoins que cette répartition n'est pas exactement uniforme et tend à présenter une surdensité sur l'axe des réels [78].
La répartition des valeurs propres de la Jacobienne à la déstabilisation est quant à elle non-uniforme sur le disque unité, comme on peut le voir sur la figure 2.7.
Outre la surdensité sur l'axe des réels que l'on retrouve, il y a une densité croissante de la périphérie vers le centre.
Cette surdensité pour les valeurs propres très petites en norme repose sur le fait qu'il existe un grand nombre de neurones dont la valeur du potentiel
correspond à une zone saturante de la fonction de transfert, auquel cas la dérivée est proche de zéro.
La pondération des lignes de la matrice des poids a pour effet de mettre un grand nombre de ces lignes à des valeurs proches de zéro, et donc de produire des valeurs propres petites.
Ceci a pour conséquence de faire reposer la valeur du rayon spectral sur un nombre restreint de neurones.
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La distribution des est fortement non gaussienne lorsqu'on effectue nos observations sur un grand nombre de réseaux (voir figures 2.3 et 2.4).
Ceci reste vrai sur des réseaux particuliers, au sein desquels la distribution des
suit la même répartition en forme de cuvette.
On voit sur ces répartitions que plus la valeur de
augmente, plus la proportion de neurones dont les valeurs sont proches du centre de la répartition (0.5) diminue.
Par conséquent, un petit nombre de neurones a une influence forte sur la valeur de la jacobienne, et donc sur la valeur de déstabilisation, tandis que la majorité des neurones, situés aux deux extémités de la distribution, ont une influence presque nulle.
Ainsi, le nombre de ces valeurs centrales est variable d'un réseau à l'autre et peut avoir un effet importants sur la valeur de déstabilisation, ce qui peut expliquer la grande disparité observée sur les valeurs de déstabilisation d'un réseau à l'autre.
Dans le prochain chapitre, on explorera plus en détail le rôle des neurones dont le potentiel est central en tant que moteurs de la dynamique du réseau.
On verra également que cette propriété a son intérêt, dans la mesure où des changements imposés sur la configuration spatiale des potentiels d'un réseau donné ont une influence directe sur les caractéristiques de la jacobienne, et par extension sur la valeur de déstabilisation ainsi que sur la période du cycle atteint.
On constate par contre que l'uniformité radiale (sur l'angle) est préservée. Toutes les directions sont représentés de façon égales, à l'exception notable de la direction correspondant à l'axe des réels dont la surdensité a déjà été mentionnée.
Par ailleurs, en supposant que tous les neurones sont indépendants, l'espérance de
vaut
.
Le disque complexe a donc pour rayon
. La valeur de
est approchée par cette grandeur.
On a reporté sur la figure 2.8 l'évolution des deux valeurs de
, l'une exacte et l'autre approchée, en faisant varier
sur un système de taille
jusqu'à la déstabilisation (depuis la valeur
jusqu'à la valeur
.
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